Seul un nouveau corps d'idées est de nature à unifier positivement le Peuple qui lutte !
Article rédigé par Brigitte Bouzonnie le 13 novembre 2018
Mélenchon l'a dit. Dans son dernier billet de blog, il écrit : "je leur demande (aux participants de la journée du 17.11), leur recommande de veiller bien scrupuleusement de ne prendre aucune attitude qui réduise la signification de l’action à celle d’une famille politique en particulier"(sic).
Autrement dit, Mélenchon demande donc fermement aux militants de la FI participants des blocages du 17 novembre 2018, de mettre leurs revendications, leur drapeau et leur programme dans leur poche. De ne surtout pas faire d'éducation populaire de nature à conscientiser le Peuple français, le faire passer d'un Peuple "en soi" à un Peuple "pour soi" capable de s'émanciper. De ne surtout pas rassembler positivement les classes populaires et une partie de la classe moyenne autour de notre programme "L'avenir en commun".
1°)- METTRE SON DRAPEAU, SES SLOGANS ET SON PROGRAMME DANS SA POCHE ?
Concrètement, il faut juste faire quelques kilomètres à pied avec les autres participants, rentrer sagement à la maison, tête basse, s'excusant même d'être une ou un militante politique de la gauche critique.
C'est justement tout le contraire qu'il faut faire ! Avoir des défilés et des revendications propres sur le modèle de la CGT du Cher ou de la CGT de PSA/Poissy, qui vont défiler derrière leurs banderoles, demandant l'augmentation de tous les salaires. Au passage, de plus en plus d'UD et d'UL CGT appellent à défiler samedi 17 novembre, contrevenant ainsi aux directives défaitistes de la direction de la CGT. De la même façon, nous proposons de faire un défilé propre à la FI, mettre en avant notre programme "L'avenir en commun", notamment le retour de l'échelle mobile, c'est à dire l'indexation des salaires, pensions de retraites et minimas sociaux sur les prix.
Comme dit Alain Badiou : "Pour avoir un résultat historique, il faut avoir une vision affirmative d'un projet. La Politique se fait au régime de ce qu'elle affirme. Une politique, c'est une conviction active, organisée, une pensée en actes, qui indique des possibilités" (sic) (extrait de sa vidéo sur la crise grecque de janvier 2013). Il faut être capable d'imposer une vision stratégique. Ce qui veut dire un système fort d'axiomes politiques qui commande un discours unificateur. Ce qui permet aux classes populaires et moyennes de se rassembler affirmativement autour d'une nouvelle possibilité politique, comme notre programme "L'avenir en commun". SEUL UN NOUVEAU CORPS D'IDEES EST DE NATURE A AGREGER, UNIFIER POSITIVEMENT LE PEUPLE QUI LUTTE.
Il faut faire passer le Peuple "en soi" à Peuple "pour soi", ce qui suppose de populariser notre programme et donc notre projet alternative politique vis à vis de Macron. Comme écrit Alain Badiou : "ce n'est pas du tout la même chose, quand, sur un sujet, il y a deux opinions en concurrence" (cf "Notre mal vient de plus loin, Penser les tueries du 13 novembre 2015", édition Lignes, 2016).
Ce n'est pas du tout la même chose quand, sur le sujet de l'absence d'argent à la fin du mois par exemple, il y a le point de vue libéral de Macron, sa (fausse) théorie du ruissellement ; le point de vue de la France insoumise, à travers son programme AEC : le rétablissement de l'échelle mobile, c'est à dire l'indexation systématique des salaries, pensions de retraites, minimas sociaux sur les prix. Il faut donc conscientiser le Peuple français, surtout pas mettre notre drapeau dans notre poche, comme le préconise fallacieusement Mélenchon.
A partie de là, participer aux blocages sans parler, émettre des slogans, de propositions, comme il le propose, est profondément hypocrite. Il serait de mèche avec Macron qu'il ne se conduirait pas autrement. Une telle attitude vise à nier la spécificité de notre rôle politique, qui est de défendre loyalement et sincèrement le Peuple qui souffre, tirant les plus faibles par le haut, le relayant au niveau politique, afin de trouver une sortie positive à ses colères et revendications.
Il faut donner acte à Mélenchon sur un point : certains gilets jaunes appellent à "dissoudre l'Assemblée Nationale", "dissoudre le Sénat", "demander le départ de l'exécutif" (sic). Mais ces slogans sont minoritaires dans un mouvement prévoyant 1 500 actions de blocages.
2°)-S' EN PRENDRE AU SEUL BUDGET 2019 DE MACRON :
Autre sujet de divergence : Mélenchon appelle à s'en prendre "uniquement" au budget 2019 de Macron. Comme si la loi de finances, aussi injuste soit-elle pour les plus défavorisés, épuisait à elle toute seule les autres sujets de discorde vis à vis de Macron : par exemple, l'ignominieuse casse du code du travail, permettant de licencier un salarié en CDI du jour au lendemain. Ce qui rend le droit du licenciement français le doit du licenciement le moins protecteur d'Europe. Une fois de plus, Mélenchon sauve le soldat Macron en rétrécissant abusivement le champ des contentieux à l'adresse du Pouvoir.
Il est du plus haut comique d'entendre Mélenchon célébrer "le mouvement d'auto organisation à la base en train de se mettre en marche" (sic). C'est vrai que comparé au fonctionnement opaque, monarchiste, clanique, à la Ceausescu de la FI, cela fait une moyenne.
Les militants de la FI suivront-ils les directives de Mélenchon ? Ou défileront-ils joyeusement, reprenant en coeur les slogans d'augmentation des salaires et de retour de l'échelle mobile que la situation du moment exige ? Les historiens jugeront…