Petits bijoux d'analyse de Alain Badiou (30), qui dit : "la nostalgie du programme social du CNR est une rêverie complètement décollée de la victoire actuelle du capitalisme mondialisé"(sic) !
Citation rédigée par Alain Badiou, choisie et commentée par Brigitte Bouzonnie le 1er juin 2023
Au second plan on reconnait Bernard Ravenel, auteur d’une histoire du PSU, dont je parle souvent, et la résistante Lucie Aubrac.
Claude Bourdet
1°)- Alain Badiou : La nostalgie du programme social du CNR est une rêverie complètement décollée de la victoire subjective spectaculaire du capitalisme mondialisé. Cette victoire a fait qu’en un temps assez court, entre 1975 et aujourd’hui, a été annulée, réduite à presque rien, la force de l’idée que, quelques soient les difficultés, une autre possibilité existait. Idée qui, encore dans les années soixante-dix du dernier siècle, animait dans le monde entier des millions de révoltés politiques”(sic), (cf son ouvrage : "Notre mal vient de plus loin. penser les tueries du 13 novembre 2015, édition Fayard, 2016).
2°)-Brigitte Bouzonnie : comme écrit avec lucidité Alain Badiou : "le CNR est devenue une rêverie coupée de la réalité de la France actuelle" (sic). Rien de plus juste. Le philosophe formule une critique fondamentale. Le 27 mai de chaque année, le fil d’actu de Facebook est rempli de posts faussement romantiques, avec naturellement une photo de Jean Moulin, célébrant de façon un peu naïve la première réunion du CNR rue du four, à Paris : comme s’il s’agissait là d’un acte fondateur de la Résistance.
Ces posts sont doublement contestables :
1°)- Rien ne justifie le primat de la réunion du CNR de 1943 sur le reste des autres évènements de la Résistance, tout aussi importants : notamment les débuts très difficiles, où elle représente à peine 2% des français (chiffre de Mireille Albrecht, fille de Bertie Albrecht). Et quand Henri Frenay, Claude Bourdet, Emmanuel D’Astier de la Vigerie passent leur temps en 1942 “à chercher les hommes et les femmes acceptant de s’engager”(sic) (cf L’aventure incertaine, op cit), ce qui se fait, mais au compte gouttes. Et avec beaucoup de refus, dont celui resté célèbre d’André Malraux. Donc, sur le plan de la réalité historique, l’évocation de cette réunion, hors contexte, comme si elle se suffisait à elle-même, n’est absolument pas justifiée.
2°)- “Cette rêverie hors sol”, comme dit très justement Alain Badiou, ne participe pas d’une véritable démarche analytique matérialiste : elle omet de faire “une analyse concrète d’une situation concrète”, pour reprendre le juste conseil de Karl Marx.
1°)-Rien ne justifie le primat de la réunion du CNR de 1943, au demeurant assez banale, sur le reste des autre évènements de la Résistance :
En effet, nous savons de façon assez précise ce que s’est dit (et pas dit) au cours de cette réunion, somme toute assez banale, grâce à Claude Bourdet, fondateur du groupe Combat avec Henri Frenay et Berty Albrecht, auteur d’un ouvrage de souvenirs sur la Résistance intitulé : “L’aventure incertaine”, première édition 1975, réédition 1998, édition du Félin. Jean Moulin préside la réunion. Y participent les partis politiques français, les mêmes, qui ont lâchement trahi les français en 1940 en acceptant lâchement la défaite. En refusant de s’engager dans la Résistance en 1942, sauf bien sûr les militants du Parti communiste. Bourdet n’est pas tendre avec les représentants de ces partis, qualifiés de “partis politiques fantômes” et de “têtes chenues”(sic).
Il n’est pas tendre non plus pour les arrivistes totalement inconnus des vrais résistants présents à cette réunion comme Joseph Laniel. “En effet, l'alliance démocratique, Parti du centre droit, est représentée par un inconnu total, mais qui dut à cette désignation de faire plus tard une carrière politique brillante, étant de tous les gouvernements de la IVème République : Joseph LANIEL”(sic) (cf L’aventure incertaine, op cit).
Seul un jeune homme dynamique, plein d’allant appelé Jacques Debu-Bridel retient l’attention de Bourdet. Officiellement, il représente le parti de Louis Marin de la Fédération Républicaine. Il a l'oeil vif, la parole énergique. Bourdet le regarde avec étonnement. Son attitude et son langage ne ressemblent pas à ce qu’il attendait d'un vieux parti de droite. En fait, comme il s’en rend compte un peu plus tard, il est en réalité membre du Front National(Parti communiste), infiltré dans le parti de Louis Marin. C'est encore un exemple de la tactique de la large ouverture des communistes.
Le contenu de cette réunion est assez fade : comme écrit Bourdet : “la séance du CNR fut sans histoire, comportant quelques prises de paroles, la lecture d'un message de DE GAULLE, et l'adoption à l'unanimité d'une motion préparée par BIDAULT et que, en tout cas, en zone sud, nous connaissions et avions déjà approuvée”(L’aventure incertaine, op cit).
2°)- Cette rêverie hors sol, comme dit très justement Alain Badiou, ne participe pas d’une véritable démarche analytique matérialiste : elle omet de faire “une analyse concrète d’une situation concrète”, pour reprendre le conseil de Karl Marx.
Aujourd’hui, l’évocation du Conseil National de la Résistance n'a plus rien à voir avec nos problèmes structurels dans la France 2023 : chômage et pauvreté de masse avec 15 millions de pauvres. Salaires jamais augmentés de façon massive depuis 1992 et suppression de l'échelle mobile. Pandémie de Covid imaginée par Bush et Cheney en 2002 + vaccins tueurs. Guerre en Ukraine, qui est en réalité une guerre impérialiste, menée par Washington pour écrabouiller la Russie. Lui prendre ses matières premières. Faire disparaitre de façon cynique l’Europe, concurrent économique, de la carte du monde. Pédophilie devenue la norme comme dit Poutine. Dégringolade intellectuelle de nos têtes depuis les années 70, avec la mise au rancart de notre culture classique de haut niveau (Voltaire, Rousseau, Victor Hugo, Balzac..) au profit d’un brouet de culture américaine à deux neurones.
La victoire subjective spectaculaire du capitalisme mondialisé, dont parle Alain Badiou : qu'elle est-elle ? Pour les marxistes, il existe un “bloc historique”, infrastructure et superstructure, formé par le capitalisme mondialisé déchainé occidental. En clair, cela veut dire, que, non seulement, l’économie, le taux de chômage (15 millions de pauvres vivant en dessous du seuil de pauvreté), le niveau des salaires sont organisés par les seuls capitalistes mondialisés, le plus souvent américains. Mais de plus, les soi disant “contre pouvoirs”, les partis politiques de gauche, les syndicats, sont verrouillés, car ils font partie du capitalisme déchainé. Ils sont corrompus et ne défendent pas véritablement les intérêts du Peuple français. Ainsi, sophie binet, nouvelle dirigeante de la CGT, qui n’a jamais travaillé de sa vie, reçoit 13 000 euros par mois, pour tenir une ligne “macron compatible”. Idem pour le 49 députés LFI, notamment mélenchon et corbière et son célèbre : “il faut critiquer macron mais pas trop”(sic) recevant les millions d’euros au titre du financement de la vie politique.
Mon ami Dominique Kern a rédigé le 31 mai 2023 un excellent article, où il montre comment “L'AUTO-SABOTAGE DE LA FRANCE INSOUMISE (première manière de Mélenchon) EN 2017 A QUELQUE CHOSE A VOIR AVEC LE FAIT DE SABOTER TOUTE POSSIBILITE D'ALTERNATIVE AU POUVOIR DE MACRON” (sic). Rien de plus juste. On rappelle que dès leur élection comme parlementaires de la FI en 2017, les 17 députés LFI ont abandonné le programme social-démocrate de la campagne présidentielle pour un positionnement à peine centre gauche. Les pseudo intellectuels de gôche se taisent et ne réfléchissent surtout pas. Notre société est structurée par le mensonge, pierre angulaire du système, comme écrit Chris Hedges, lanceur d’alertes, ex journaliste vedette du New York Times. Le système veut empêcher les français de comprendre à minima ce qui leur arrive. Voilà pourquoi on les laisse patauger sciemment dans leur potage intellectuel.
Nous vivons une période dramatique, et ce n’est pas la rêverie de la première réunion du CNR, qui va nous sortir de la gadoue dans laquelle nous sommes plongés depuis les années quatre-vingt avec le félon mitterrand.
Ce sont ces problèmes là bien concrets, qu'il faut dénoncer, en proposant des solutions, comme le fait notre programme politique du Rassemblement "Pouvoir au Peuple" en 44 mesures rédigé par mes amis Philippe Meens, Monika Karbowska Dominique Kern, Jilles Lazardeux et moi. Certainement pas rêver sur la figure de Jean Moulin, aussi autoritaire sinon plus que De Gaulle, qui voulait inféoder grossièrement aux bureaucrates de Londres les groupes de résistance du sud de la France, celui de Frenay et de Bourdet (Combat), et celui de Emmanuel D’Astier de la Vigerie (Libération sud). Et subordonner leur existence à “l’autoritarisme maladif”(dixit Bourdet) du Général de Gaulle.
Vous savez : je connais très bien le programme du CNR. En juin 2019, lorsque nous avons voulu rédiger notre programme du Rassemblement "Pouvoir au Peuple", Clémentine Langlois m’a proposée d’utiliser ce programme comme “modèle”. Je suis restée deux jours avec ma page blanche, tant les préoccupations de ce programme sont différentes des problèmes de la France 2019. Ce que voyant, j’ai pris pour modèle le programme social-démocrate du PG/FDG L’humain d‘abord de 2012. Ensuite, dans un premier temps, lorsque je montrais notre programme aux militants de la FI : ils me répondaient : c’est bien, cela ressemble au programme de la FI. Effectivement, il existait un cousinage idéologique, même si notre programme prévoyait déjà de nombreuses nationalisations et une lutte conséquente et frontale contre la pauvreté. Heureusement, Domi a proposé la rédaction d’une nouvelle Constitution sur les rond points des Gilets Jaunes, lieux de départs des manifs, esquisse d’un pouvoir à la base, qui à terme gouvernera seul le pays. Monika a proposé la nationalisation de Facebook. Jilles Lazardeux la renégociation et l’effacement concertée de la dette au niveau mondial. De mon côté, j’ai proposé un programme de lutte contre le chômage et la pauvreté visant à ce qu’il reste zéro pauvre, zéro chômeur. Soit toute une batterie de propositions en rupture avec le capitalisme mondialisé actuel. Dont la réalisation effective suppose forcément de rompre avec ce système pourri. Voilà pourquoi aujourd’hui, le programme du rassemblement Pouvoir au Peuple n’a plus rien à voir avec le programme de la France Insoumise.
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