Bourdieu : "Nous avons perdu la philosophie des Lumières" : première partie...!
Article rédigé par Brigitte Bouzonnie
Au cours d’une discussion avec l’écrivain allemand Gunther Walhraf, Pierre BOURDIEU dit : "Ce sentiment que nous avons d'avoir perdu la tradition de la philosophie des Lumières est lié au grand renversement du monde, que nous a imposés le néo-libéralisme et la révolution conservatrice qui s'y attache. La révolution néo-libérale revient au passe, et se présente comme "progressiste". Ceux qui la combattent ont l'air régressiste, on se fait traiter "d'archaïques", de "ringards". L'époque n'est pas drôle (réponse à l'écrivain Gunther Walraff, qui reproche aux écrits de Bourdieu de manquer d'humour). D'autant plus que la mise en application de cette révolution conservatrice a été le fait des Schroeder, Blair et Jospin, autrement dit des "socialistes". C'est la grande force de cette révolution néo-libérale, c'est ce qui rend la critique très difficile. On est obligé de demander plus d'état, alors que l'on est de culture anarchiste..." (Cf film "La sociologie est un sport de combat" de Pierre Carles, 2002).
Ce très beau passage du film de Pierre Carles sur Pierre Bourdieu m'inspire deux commentaires :
1)- “Nous avons perdu l’esprit des Lumières” est un propos énoncé dans les années 90 : Bourdieu avait alors trois siècles d'avance sur nos "penseurs” hétérodoxes : Jacques Sapir, Frédéric Lordon. Ils feraient bien de se secouer un peu. Ecrire des choses théoriques importantes. Défendre clairement le peuple français qui se noie.
BOURDIEU dit que nous avons perdu la philosophie des Lumières, projet humaniste au coeur de toute véritable culture de gauche. Et qui me tient particulièrement a coeur, L'auteur de "La reproduction" met le doigt là où ça fait mal. Là où viennent tous nos malheurs actuels attachée à cette révolution conservatrice, faisant un bras d'honneur à l'Humanisme majuscule du XVIIIème siècle, fondant toute véritable politique de gauche
Bourdieu montre le rôle pilote joue par les Blair, Schroeder, Jospin, cette fausse de gauche en réalité force de droite chimiquement pure...il faudrait ajouter Hollande, Valls et Aubry dans ce retour en arrière bafouant, piétinant Les Droits de l'Homme, l'idée élémentaire de "justice sociale", et de défense des plus fragiles.
Projet qui a au surplus le culot de se présenter comme "moderne". Cette analyse de Bourdieu, on ne le dira jamais assez, histoire de faire de l'éducation populaire auprès des gens peu politisés. Les gens doivent avoir conscience du bagne anti-humaniste dans lequel nous vivons, résultant largement de l'action de ces pseudo "socialistes allant de Mitterrand à Macron.
2)-”Nous avons perdu l’esprit des Lumières” est un propos de Bourdieu, qui devrait figurer en fronton de notre programme du Rassemblement “Pouvoir au Peuple". Tant, de par sa lucidité, il est central, tout à la fois, pour expliquer :
2.1)- le projet mortifère du libéralisme, qui se met en place à compter du milieu des années 70, avec les grandes manoeuvres entreprises par les grands patrons, afin de lutter contre la chute de leur taux de profit : mondialisation des échanges, ce qui revient à casse notre appareil industriel. Courbe du Chômage de masse, que, depuis les années 80, les gouvernements successifs laissent volontairement filer. Etat providence raclé jusqu’à l’os….
2-2°)- Le projet mortifère du libéralisme revient à imposer un anti humanisme puant, et la mise à mort sociale du Peuple français.
a)-La première fois que je me suis faite cette réflexion, c’était en réaction au texte de congrès rédigé par Edmond Maire, imposant une stratégie de recentrage à la CFDT, en 1976. Il s’agissait clairement de en plus défendre le peuple français, dans ses problèmes d’emploi et de salaire, afin de faire triompher la stratégie des patrons de mise à mort sociale de la population salariée.
b)-Maire était un défricheur. C’est martine Aubry ensuite qui a pris la suite dans son projet de génocide salarial.
- Ainsi, Aubry a rédigé avec l'UIMM au téléphone la sinistre loi sur la flexibilité de 1987, obligeant les salaries a aller travailler les ponts et jours fériés.
- Deux fois ministre du travail, Aubry a refusé de rétablir l'autorisation administrative de licenciement, pour plaire aux patrons, ses grands amis de toujours.
- En avril 2000, elle a supprimé avec Jospin 4/5 des enveloppes d'emplois jeunes, CES et contrats emploi consolides. Comment, la encore, les énarques socialistes couraient dans les couloirs pour mettre fin plus vite a la mesure des emplois jeunes qu'ils avaient rédigés en 1997...
c)-Et c’est Macron qui a fini la sale besogne, en cassant notre code du travail vieux de 150 ans de luttes sociales par une loi de décembre 2017.
2,2)- La difficulté de se battre contre le chômage vient du succès immense de ce projet profondément anti-humaniste, anti populaire :
Je le sais depuis toujours. Depuis 2009, je me bats pour que le chômage, la lutte contre la pauvreté soient les idées majeures de la gauche critique. J'ai essuyé des refus partout : au PG, au NPA ou j'ai milite un an, au PCF, chez ATTAC, Fondation Copernic...refus aussi de maisons d'édition comme "La Découverte" qui ont refuse le manuscrit de mon premier livre...Cela montre le triomphe incroyable des idées anti-humanistes, anti-Peuples, y compris au sein de la gauche critique que nous sommes.
L'idée élémentaire, qu'une femme ou un homme ait un emploi ou un revenu d'existence décent pour vivre n'est même pas reconnue comme la chose au monde la plus importante. Pourtant il est bien là le véritable humanisme, à cent mille années lumière du discours d’un Mélenchon par exemple.
Et pourtant, d’un emploi pour tous, on ne parle jamais. Un exemple entre mille : hier, je postai sur mon mur le dernier billet de blog de Corinne Morel-Darleux, recommandant d'approfondir notre programme "L'Humain d'abord", une idée que je partage 5 sur 5. Mais, parmi les pistes proposées, la question sociale est seulement abordée a travers l'item d'une "nouvelle répartition des richesses". Le terme de “répartition des richesses” (entre le travail et le capital) est profondément fallacieux. La réalité dans les boites, c’est une dispute historique, permanente, inexpugnable entre le patron qui veut tout ; les salariés cherchant à avoir des bribes de la richesse créée.
Dans son ouvrage intitulé : “Accumulation, inflation, crise”, édition PUF, 1979,, l’économiste (et pape) de la régulation sociale, Robert Boyer, dit que le capitalisme fordiste repose notamment sur un “partage conflictuel de la valeur ajoutée”. (sic). Ce terme, meilleur que “répartition des richesses, laissant croire que le patron, dans sa grande générosité, partage chaque année les bénéfices avec ses salariés, alors qu’il garde TOUT : donc ce mot de partage conflictuel lui avait valu, en son temps, un véritable procès de Moscou, fait par les intellectuels communistes : Emmanuel Wallerstein et ses potes. Ces derniers lui reprochaient, sans sans quelque pertinence, le mot “partage”. Qu’auraient-ils dit du terme angélique, menteur, totalement hors sol de “répartition des richesses”?! Nul doute que les rédacteurs des programmes du PG/FDG/FI/NUPES n’ont jamais été obligés de prendre leur musette pour aller travailler chaque matin !
Aucun questionnement jamais abordé dans ces programmes : comment lutter contre le chômage de 9 millions de personnes privées d'emploi et la pauvreté de 15 millions de femmes et d'hommes vivants avec beaucoup moins de 977 euros par mois.
Il faut absolument revenir à l'Humanisme des Lumières. Elaborer une politique véritablement populaire, dans ce monde devenu jungle d'outre terre. Avec des propositions précises comme le retour au PLEIN EMPLOI, mot partagé par Pierre MENDES-FRANCE, Ambroise CROIZAT, POMPIDOU, et l'Abbé PIERRE..., Et qui a totalement disparu de notre vocabulaire politique.
- une relance keynésienne de nature a créer des centaines de milliers d'emplois,
- L'obligation, pour l'employeur qui licencie, de faire une offre de reclassement a salaire et statut égal,
- La création de 2 millions de contrats aides en CDI dans le secteur associatif, débouchant obligatoirement sur de l'emploi durable,
- Un pouvoir de veto donne au comite d'entreprise de contrecarrer les plans sociaux voulus par l’employeur,
- Un revenu d'existence décent pour ceux qui ne peuvent pas travailler.