Encore un titre (faussement) rageur et étincelant de la "une" du Canard Enchainé : "Il enchaîne les débats-marathon en bras de chemise. Macron n'est pas en campagne, mais c'est tout com' ! " Et un contenu ultra vide, ultra-complaisant pour le Pouvoir, signé Éric Emptaz, dont on voit la photo dans Gala, avec les ultra-riches branchés du moment.
De quoi nous parle-t-il ? Des hésitations de Macron à recourir au référendum, son ardeur référendaire refroidie par les échecs de De Gaulle en 1969 et Chirac en 2005. Du RIC et des Gilets Jaunes présentés aimablement comme "énervés"(sic), -c'est vrai que l'ultraviolence des CRS tirant au flasball dans le visage n'est pas mal non plus. Mais bizarrement, Emptaz a la mémoire qui flanche, lorsqu'il s'agit de décrire ce qui se passe, de l'autre côté de la barricade. En revanche, les Gilets Jaunes sont aimablement présentés comme"ne lâchant pas les baskets de Macron et de sa femme"(sic).
Difficile d'être plus partial, plus orienté, plus de parti-pris vis à vis des Gilets Jaunes. Malgré leur remontée et leur côte idéale dans les sondages : 77% des français approuvant leur mouvement, soit deux points de plus en un mois (cf sondage mensuel Yougov). Hier, dans le bus, j'écoutais deux vieux Messieurs parler du temps qui passe. L'un à dit : "avant, on avait des syndicats. Maintenant, on a les Gilets Jaunes"(sic), propos qui montrent, s'il en était besoin, combien, en deux mois, les Gilets Jaunes se sont imposés dans le paysage politco-social. Mais aussi dans les têtes et dans les coeurs : à la place de Martinez et Berger, corrompus et totalement démonétisés. Une telle métamorphose de la lutte sociale, qui l'eut seulement cru et anticipé, hier encore...?
Pourtant, dans cet océan de complaisances, Emptaz lâche deux flèches assassines : "(la nécessité) de sortir du grand bourbier"(sic), pour parler de la situation actuelle. Et : "va-t-il (Macron) ou non parvenir à calmer cette colère populaire, sans avoir à jouer son quinquennat ? "
En clair, Macron, en dépit de son numéro de danseur mondain, patinant en arabesques imprévisibles sur le lac gelé de ses propres mensonges, un libéralisme mondilaisé, piloté par les seuls Mensonge et falshball, en guise "d'éclairage" des consciences, qui n'ont de "citoyennes" que le nom, pour parler des privés de droits, notamment du droit constitutionnel de manifester, que nous sommes.
Donc, le petit poudré est dans la panade. En roue libre. Seul, face à un mouvement social têtu, déterminé, nullement décidé à plier l'âme et à rentrer à la maison. Le Pouvoir a peur. Le Pouvoir est aux abois. La fébrilité, l'inquiétude se sont installées en haut lieu, face à un peuple qui se réveille, esquissant une nouvelle unité populaire (Gilets Jaunes + gilets rouges + étudiants), comme la grève du 5 février 2019 l'a clairement montrée.
Macron vient de dire qu'il ne voulait pas faire comme les autres Présidents : "pas de Grenelle, pas de dissolution de l'Asssemblée, pas de nouveau Gouvernement"(sic). Soit. Mais ses "solutions" à lui : monologues bidons et vides, pseudo référendum truqué, si elles sont "originales" sur le papier, ont encore leurs preuves à faire.
A la différence de la gestion de Mai 68 par un De Gaulle/Pompidou, qui a eu pour elle, de ramener le calme dans le pays, ce qui n’est pas négligeable après une grève de 17 millions de salariés. On ne peut pas en dire autant de la gestion calamiteuse par Macron du mouvement des gilets jaunes, mouvement qui va perdurer encore et encore sur la durée, victoires et échecs étant abolis. Pareil à un très long Mai 68.
Comme analysait avec lucidité Alain Badiou à propos de la mobilisation anti Khomri : "Dans le passé, les gouvernements étaient au fond d'accord avec l'idée qu'une fois atteint un certain degré d'ampleur des mobilisations, il leur fallait reculer. Ils ne le pensent plus aujourd'hui. Je pense que c'est d'abord parce que tout le monde (ou presque) partage l'idée qu'un autre monde n'est pas possible" (sic) (Politis, 22 septembre 2016).
De la même façon aujourd'hui, face aux Gilets Jaunes, pourquoi céder à ces manants, à ces gueux ? Pourquoi céder à ces sans nom ces sans grade, quand Sarkosy (réforme des retraites, 2010), Hollande (loi Travail, 2016) n'ont pas cédé face à de très belles mobilisations, mettant des millions et des millions de personnes dans la rue ?! Avec, on s’en souvient, une opinion publique favorable aux grévistes. Mais aujourd'hui, pas de Martinez, pas de Thibaut félon, pour "arrêter" la belle mobilisation du moment. Remettre les grévistes au travail. Vider les rues de ces supposées “classes travailleuses, classes dangereuses”.
Voilà pourquoi la situation est plus imprévisible que jamais, que l'on se place de l'un ou l'autre côté du flasball....!