Lettre ouverte au Camarade Jean-Pierre Garnier, qui me reproche de ne pas tenir compte de la réalité des régimes dit «communistes» !
Article rédigé par le sociologue Jean-Pierre Garnier, auteur de la deuxième droite, et Brigitte Bouzonnie
1°)- Jean-Pierre Garnier : 1-1° Je n'ai jamais milité à la Ligue Communiste Révolutionnaire, qui n'existait pas quand j'avais adhéré au trotskisme... et au castrisme via une organisation en voie de formation : la Jeunesse communiste révolutionnaire (JCR). Celle-ci sera interdite après Mai 68 par le ministre de l'Intérieur Raymond Marcelin. À mon retour de Cuba en 1971, je militerai quelques mois dans un groupe né d'une scission d'avec la LCR, Révolution, de tendance maoïste. L'un de ses fondateurs était l'économiste Isaac Joshua, qui avait lui aussi travaillé à Cuba, décédé il y a peu.
1-2° Je ne confond pas les premiers discours de Fidel, effectivement dignes d'intérêt — ils font partie des raisons qui m'avaient incité à émigrer à Cuba — avec ce qu'il est advenu par la suite de la révolution cubaine.
1-3° Libre à toi de ne tenir aucun compte de la réalité d'un régime dit «socialiste» ou «communiste». Avec ce type de postulat, je ne m'étonne pas du culte que tu voues à Badiou, qui ignore totalement, volontairement ou non, ce qu'il en fut réellement du «Grand bond en avant» chinois puis de la «Révolution culturelle» maoïste.
1-4° D'une manière générale, la «promesse d'un autre monde communiste» qui guide ta réflexion (ou ce qui en tient lieu), incarnée selon toi par certains régimes, partis voire idéologues du genre Alain Badiou (à ne pas confondre avec Ali Baddou, autre philosophe et influenceur) ne vaut que pour ceux qui croient (pour reprendre une citation célèbre). Ce n'est plus mon cas depuis des lustres.
Jean-Pierre
2°)-Brigitte Bouzonnie : 2-1°)-Bonjour Jean-Pierre, tu écris que tu ne crois plus à l’hypothèse d’un monde meilleur, et je te plains sincèrement d’avoir cette carence. Car il a été démontré scientifiquement, que les femmes et les hommes qui avaient une conviction solide étaient plus forts, plus résistants que les autres. Ainsi, chacun sait que ce sont les déportés, de conviction catholique comme Madame Geneviève Antonioz-De-Gaulle, internée au camp de Ravensbrück (voir son livre La traversée de la nuit). Un Catho-gaucho comme le résistant et fondateur de Combat, Claude Bourdet, interné au camp de Dachau, (cf son livre de mémoires : l’aventure incertaine, édition du Félin, 1998. Une militante communiste comme Charlotte Delbo, secrétaire de Louis Jouvet, déportée au camp de Auchwitz, auteur de : Aucun de nous ne reviendra, aux éditions de minuit, qui ont survécu, quand tant d’autres déportés hélas ne sont pas revenus.
Comme écrit Claude Bourdet : “nous (déportés) n’avions qu’une énergie d’insecte à survivre”(sic). Et lorsqu’on est un microbe à cent mètres de la chambre à gaz, croire au communisme ou à Dieu, cela sert énormément à survivre ! Premier point.
2-2°)- Tu condamnes les régimes communistes sans autre forme de procès. Je crois que tu as de sérieuses lectures et vidéos en retard. Je te conseille de regarder la vidéo de Madame Annie Lacroix-Riz intitulée : “le livre noir de l’anticommunisme”, 2014 à la librairie Tropiques.
Madame Annie Lacroix-Riz pointe et démontre la falsification énorme de l’histoire soviétique : “Il s’agit de montrer comment la Révolution d’Octobre et la suite sont fabriqués, mais à un degré inimaginable, pour le commun des mortels. Tout un travail reste à faire sur les conditions de mise en oeuvre de la falsification de l’histoire soviétique. Et de citer ses deux livres de référence : “L’histoire sous influence” (1984) et “L’histoire toujours sous influence” : 2012. Cela pose le problème des “historiens du consensus”, dont le travail est rémunéré par la CIA. C’est clair que toute une opération politique a été mise en oeuvre en ce sens”(sic).
Il y a un très bon auteur américain : Christopher Simpson, auteur de “Retour de Flammes”, 1988. Il a écrit sur les universités, l’Empire us, l’argent dans les sciences sociales. Comment les universitaires des universités américaines les plus prestigieuses ont été engagés et promus par la CIA. Comment leurs travaux ont eu beaucoup de succès. Comment la CIA a assuré la diffusion de leurs livres. L’université de Harvard a été associée à des programmes de “connaissance” sur l’Union soviétique, qui n’avaient pas toute la scientificité requise. Il s’agissait d’engager l’université dans une tâche générale, visant à mettre à terre l’Union Soviétique. Tous les universitaires qui ne prêtaient pas serment d’anticommunisme voyaient leur vie ruinée”(sic)..
De son côté, l’étude récente rédigée par Grover Furr aux éditions Delga montre que le rapport Krouchtchev est un fake. Information majeure qui exige de repenser complètement l’histoire soviétique, l’histoire du socialisme. Dans son « rapport secret » de février 1956, Nikita Khrouchtchev accuse Joseph Staline de crimes immenses. Le rapport porte un coup terrible au mouvement communiste international. Change le cours de l’histoire. Par exemple, on peut affirmer que Mitterrand ne serait jamais devenu Président de la République en 1981, avec un parti communiste non délégitimé, démonétisé par le triste rapport Krouchtchev.
Aymeric Morville, éditeur des éditions Delga, écrit notamment en quatrième de couverture : “En fondant leurs oeuvres sur les mensonges de Khrouchtchev, les historiens soviétiques et occidentaux, notamment les trotskistes et les anticommunistes, ont véritablement falsifié l’histoire soviétique. Presque tout ce que nous croyions savoir sur les années Staline est à revoir. L’histoire de l’URSS et du mouvement communiste est à réécrire complètement.
“Le livre de Grover Furr exige de repenser complètement l’histoire soviétique, l’histoire du socialisme et même de l’histoire mondiale du XXe siècle”(sic).
A ce stade, on ressent comme un vertige, face à cette réalité historique fallacieuse, structurant notre connaissance du monde communiste. Tout reste à reconstruire idéologiquement parlant, avec notamment un Staline, qui sans être une blanche colombe, ne mérite pas tous les crimes, qu’on lui attribue, autrement que sur le papier du rapport Krouchtchev. Je me souviens d’un débat avec mon ami Jean-Pierre Combe, militant du Pôle pour la Renaissance du Communisme Français. Il me disait que “lorsque toutes les archives sortiront, on découvrira un Staline gris”(sic). Et ce sera déjà une immense avancée par rapport à l‘imaginaire actuel de chacune et de chacun dans la France 2023, le présentant comme un monstre, avec le visage noir de Lucifer, des crochets à la place des mains. Dans une “biographie” sur Staline, j’ai même lu que les hémisphères de son cerveau étaient deux fois supérieures à la moyenne.
*Je te recommande aussi la lecture de : Le Vol de Piatakov, rédigé par Daniele Burgio, Massimo Leoni et Roberto Sidoli, aux éditions Delga, 2022.
Lors du procès de Moscou de janvier 1937, Guéorgui Piatakov, vice-ministre de l’Industrie lourde soviétique de 1932 à août 1936, a reconnu avoir pris en secret un avion à Berlin en décembre 1935, avec l’aide des hitlériens au pouvoir, pour atterrir quelques heures plus tard en Norvège et rencontrer tout aussi secrètement Trotsky dont il prétendait être, depuis la seconde moitié de 1931, un partisan caché et une « taupe » habile, solidement établie au plus haut niveau de l’appareil économique de l’Union soviétique stalinienne.
En réalité, c’est à partir de sources et de documents anti-staliniens incontestables, à commencer par les archives de Trotsky à Harvard, qu’est apparue récemment une série de révélations retentissantes qui prouvent de manière concluante la collaboration directe entre les nazis au pouvoir et Trotsky.
Jean-Pierre, je crois que tu es intoxiqué par la littérature faussement “historique” de la CIA. Un bon programme de sevrage s’impose.
J’aime beaucoup ton travail sur la bobocratie, où ce que tu écris est unique sur la place de Paris. En particulier, je recherche un de tes articles, que j’adore sur les convois de la liberté. Tu montres comment les convois de la libertés sont accueillis comme des princes à Limoges, par une foule en liesse. Idem à Lyon, où un public de jeunes leur dresse un feu d’artifice. Idem à Orléans. C’est magnifique. Inversement, à Paris, ils ont droit à l’accueil frigidaire des bobos gagnant entre 4000 et plus de 10 000 euros par mois. Favorables à la Bourgeoisie et à l’immobilisme social. Le tout extrêmement bien démontré sur le plan sociologique. J’aimerais bien que tu me l’envoies, pour que je le reposte dans la lettre politique indépendante.
Si ça peut te rassurer, sache que, dans mon modeste Panthéon personnel, il y a de la place pour toi et pour Alain Badiou.
Amicalement :
Brigitte
PS : j’ai rectifié mon papier en disant que tu étais sympathisant de La ligue Communiste Révolutionnaire. Encore une fois, je te présente toutes mes excuses pour avoir commis cette erreur.
Le ven. 28 avr. 2023 à 07:46, Brigitte Bouzonnie from Lettre pollitique de Brigitte Pascall <brigittebouzonnie@substack.com> a écri
Petite discussion sur Cuba !
Article rédigé par Christophe Saulière, Marie Hourrah, Brigitte Bouzonnie
APR 28
3°)- Brigitte Bouzonnie : Dans Cuba, il y a à boire et à manger.
3-1°)- Antoine de Caunes, socialisé à droite comme il n'en a jamais fait mystère, a réalisé un film à Cuba. On ne s'y attendait pas, venant de la part d'un présentateur bobo parisien, mais il dit combien les cubains sont heureux et "ont la banane"(sic).
3-2°)- Jean-Pierre Garnier, sociologue et auteur de la "Deuxième droite" (PS), ex militant de la LCR, a vécu 5 ans à Cuba comme urbaniste. Il a vu Castro et sa bande s'embourgeoiser, d’accord. Ce qui ne veut pas dire que les premiers écrits de Fidel Castro (comme les lignes citées par le camarade Christophe Saulière) ne soient pas intéressantes à lire au premier degré.
Nous au PSU, c'était de la Yougoslavie (et de l'autogestion) dont on rêvait. Rocard, Bouchardeau et tant de militants de base ont tous fait leur voyage en Yougoslavie.
A la Ligue, les militants rêvaient de Cuba. Mais, quels que soient ses défauts, je ne dirai jamais de mal de Cuba, qui était la promesse d'un autre monde communiste : promesse que l'on a hélas totalement perdue aujourd'hui ! C'est de cela dont je pleure, et non les défauts de tel ou tel régime "rouge".
😉