Les 2 capitalismes : le capitalisme keynésien très créateur d’emplois et le capitalisme mondialisé occidental faiblement créateur d’emplois !
Propositions économiques du Programme Rassemblement Pouvoir au Peuple. Texte introductif aux propositions économiques rédigé par Brigitte Bouzonnie le 31/07/2023
Texte introductif : comme explique l’économiste Frédéric Lordon sur une vidéo youtube (les 2 mentalités du capitalisme), il existe deux logiques du capitalisme.
1-1°)-« Le capitalisme keynésien, par définition, dans sa mentalité, veut créer de façon intensive des biens et des services »(sic). Que veut dire Frédéric Lordon ? Le profit du capitalisme keynésien fordiste, il le tire de la production fordiste de biens, par exemple, la construction d’automobiles. En mobilisant les 3 X 8, c’est-à-dire l’enchainement de 3 équipes travaillant de façon discontinue chacune 8 heures sur la chaine.
Naturellement, en capitalisme keynésien, le travail à la chaine ne représente que 8% du travail total. Mais pour les autres secteurs, non couverts par la chaine, c’est la production intensive, le rendement qui sont les maitres mots, y compris dans les services : hôpital, centre de sécurité sociale.
Cette production intensive, telle que nous l’avons vécu entre 1945 et 1981, nécessite d’abord et surtout de l’emploi. On ne le dira jamais assez : mais les années 1945-1981 sont des années de plein emploi. Georges Pompidou ne dort plus la nuit quand, il apprend que la France compte 400 000 chômeurs en 1967. Ce que voyant il confie la rédaction d’un rapport à François-Xavier Ortoli et Jacques Delors, chargés de mission au Plan (Commissariat général au Plan), qui font des propositions (primes géographiques à l’emploi, primes pour qui accepte de changer de secteur d’emploi) aussitôt appliquées dans tous les accords de branche : métallurgie, chimie... En 1968, le chômage retombe à 50 000 demandeurs d’emploi. Mais la publication précipitée de ce rapport montre l’importance qu’accorde un Premier Ministre, puis un Président de la République en exercice (Georges Pompidou) à l’emploi. Et au plein emploi.
Donc on le voit : rien que pour fonctionner, le capitalisme keynésien est fortement créateur d’emplois. Par exemple, le philosophe Alain Badiou a tout à fait raison de raconter comment, dans les années 1960-1970, des travailleurs émigrés venus d’Algérie, Tunisie, Maroc, Mali, etc., arrivent en France par avions entiers et par millions, afin de travailler dans notre pays. Car les salariés français issus du monde rural ne suffisent pas. On le voit : dans les années 1960/1970, avec des taux de croissance du PIB à plus de 3% par an, le plein emploi est une condition sine qua non de la réussite du capitalisme keynésien.
1-2°)- Dans son ADN, le capitalisme mondialisé occidental est faiblement créateur d’emplois.
Inversement, comme nous dit Frédéric Lordon, le capitalisme libéral mondialisé financier est faiblement créateur d’emplois.
A compter des années 1970, on assiste à une baisse tendancielle du taux de profit. Afin de contrecarrer ce taux de profit en chute libre, la Bourgeoisie ouvre les frontières, cassant le marché intérieur. Liquidant notre industrie. Entre 1974 et 2018, la France perd 1,5 millions d’emplois industriels, au profit de la Pologne, Lettonie, Estonie, etc.. (article du 15 novembre 2021 du site ELUCID). Casse le statut du salarié fordiste et ses avantages sociaux.
Le coût du travail est diminué de façon forcenée. Avec le capitalisme mondialisé occidental, on n’embauche peu. Toujours au compte-gouttes. Tout le contraire du capitalisme fordiste. Un chômage de masse structurel résulte du succès de ce nouveau capitalisme libéral mondialisé occidental : 1 million de chômeurs en 1980. 2 millions en 1988. 3 millions en 1997. 6,5 millions aujourd’hui selon les chiffres de la DARES. Mais, avec un cynisme consommé, les grands patrons français, les nouveaux dirigeants français comme mitterrand, laissent filer sciemment, volontairement, en toute connaissance de cause, la courbe du chômage. Tout le contraire de l’attitude d’un Pompidou.
La seule chose qui compte, c’est le profit, le rendement à court terme. Voilà ce que dit Roger Carey, patron de Saville Gordon : « Nous étions excédentaires de partout. Nous avions des rendements fantastiques. Une croissance terrible, mais les investisseurs n’écoutaient pas : c’était comme parler à un mur : il leur en fallait toujours plus »(sic) (cf ouvrage rédigé par Frédéric Lordon : Et la vertu sauvera le monde, après la débâcle financière, le salut par l’éthique ?, édition Raison d’agir, 2008).
Le seul critère qui vaille, c’est le profit à court terme, l’argent qu’empochent les actionnaires sacrés nouveaux Dieux du moment. Ainsi, comme analyse l‘économiste hétérodoxe Philippe Béchade : « aux Etats-Unis, on n’hésite pas à licencier toute une entreprise de salariés qualifiés, rien que pour faire monter le cours de la bourse. Pour les capitalistes mondialisés occidentaux, une vie décente pour chacun, la cohésion sociale du groupe France sont des préoccupations d’une autre époque, qui n’ont plus aucune importance.
Du jour au lendemain, la question du chômage disparait du débat public et des médias aux ordres. Jugée sans intérêt. Dans les années 1980, les « socialistes », Mitterrand, Fabius, et responsables du parti socialiste, notamment Jospin et le sénateur Jean-Luc Mélenchon participent sciemment à cette triste omerta sur la question du chômage. Les ouvriers sont invisibilisés des médias, tenus pour quantité négligeable.
Pire encore, de façon cynique, Fabius, Premier Ministre, ferme les fiefs industriels du nord et de l’est de la France, transmuant une ville prospère comme Lille en ville paupérisée, avec des sans-abris qui jonchent les trottoirs.
Le pire est que, dans le débat public, les militants, y compris les militants de la gauche critique, renvoient dos à dos capitalisme keynésien et capitalisme mondialisé occidental. Ils nous disent que « c’est la même chose »(sic). Or, les développements ci-dessus montrent clairement, que sur le terrain de l’emploi, le capitalisme keynésien et le capitalisme mondialisé occidental sont deux réalités aussi opposées que possible !
On voit donc que dans l’ADN même du capitalisme libéral financier mondialisé, et à la différence du capitalisme keynésien comme celui du temps de Roosevelt, il n’y a aucune place pour le plein emploi. Mais pour son exact opposé : l’objectif structurel du capitalisme mondialisé est de faire un maximum de chômeurs afin de réduire les coûts.
Le capitalisme mondialisé occidental est criminel. a°)-Criminel, parce que responsable depuis 1945 de 22 guerres qui ont fait 400 000 morts. b°)-Criminel aussi, parce que responsable de la mort sociale de 132 millions de demandeurs d’emploi rien que pour l’Union Européenne. Une situation qui ne va pas de soi, si on se souvient qu'avec le capitalisme keynésien, le plein emploi régnait dans les pays européens (République Fédérale Allemande, France, Grande Bretagne, Espagne, Italie…) dans les années 1960. Criminel parce que le capitalisme mondialisé occidental est responsable de la mort sociale de 9,7 millions d’américains, selon le chiffre officiel du chômage. Mais ce chiffre est contesté par l’économiste hétérodoxe Olivier Delamarche, parlant au contraire de 100 millions de chômeurs aux USA. Il n’y a que le président Donald Trump qui ait sérieusement diminué le nombre de chômeurs, à hauteur de 5 millions de demandeurs d’emploi, au cours de son mandat : 2016-2020.
Total : 232 millions de chômeurs sont donc directement causés par le capitalisme mondialisé occidental. Le pire est que personne ne moufte. Personne en France ne prend la mesure de la véritable guerre civile menée par le capitalisme mondialisé occidental contre les peuples européens et états-uniens.
c°)- De même, Le capitalisme mondialisé occidental est criminel, parce que responsable de la mort de 5 millions de personnes par le Covid augmenté en laboratoire (coucou Fauci !) et 25 000 décès par les vaccins tueurs rien qu’en Europe.
2°)-Vie, mort et résurrection de la politique keynésienne
Vie, mort et résurrection de la politique keynésienne. Voilà comment on peut résumer 90 ans de keynésianisme : 1933-2023. D’abord la success story incontestée du New deal (1934-1945). Puis, à compter des années quatre-vingts, la mise au rancart féroce et discutable de toute politique keynésienne. Et enfin, depuis ces dernières années, on assiste au grand retour d’un état keynésien, d’abord en Chine, puis aux Etats-Unis, pourtant chantre du libéralisme.
On rappelle le mécanisme du multiplicateur de Keynes : au départ, les pouvoirs publics injectent dans l’économie une somme importante : 100 milliards d’euros par exemple. Cette somme permet d’effectuer de grands travaux publics. Embaucher massivement de la main d’oeuvre, c’est à dire recruter en CDI un million de salariés jusque-là au chômage. A leur tour les salariés consomment leur salaire : nourriture, logement, vêtements, transport, tourisme, livres, ordinateurs, culture….L’addition des salaires de 1 million de salariés recrée une demande intérieure, qui assure prospérité sociale (chômage au plus bas) et économique : toutes les entreprises de l’hexagone bénéficient de cette manne financière nouvelle, que sont les nouveaux salaires des ex-chômeurs. De son côté, l’Etat bénéficie de nouvelles rentrées fiscales directes ou indirectes.
C’est ce qu’on appelle le multiplicateur de Keynes : si on injecte +100 dans l’économie, on obtient in fine +1000, car la relance bénéficie à tous les acteurs privés et publics de cette économie.
2-1°)- Le succès de la politique du New Deal :
La politique de relance keynésienne (New Deal) est utilisée pour la première fois aux Etats-Unis avec le Président F-D Roosevelt avec J-M Keynes comme conseiller économique. La crise de 1929 génère 15 millions de chômeurs et pauvres états-uniens. On les voit marcher tristement sur la route sans but. Sans activité. Comme explique l’historien André Kaspi dans sa biographie de Roosevelt, aux éditions Fayard, Roosevelt est élu en 1934 avec la vague promesse : il va “faire quelque chose”(sic) sur l’emploi. Rien de plus.
Roosevelt multiplie les plans de relance, souvent de véritables usines à gaz. Dans un premier temps, rien ne se passe. Il faut attendre 1936, pour voir le niveau du chômage commencer à diminuer timidement. Roosevelt persévère, continuant de mener une politique keynésienne multiforme, notamment les grands travaux d’aménagement dans le Tennessee, de nature à créer des centaines de milliers d’emploi pour les américains au chômage. Mais aussi et c’est moins connu des contrats aidés dans le secteur associatif. La seconde guerre mondiale fonctionne à son tour comme un plan keynésien de relance de l’industrie de l’armement, notamment avec la construction par l’économie américaine du célèbre T34 pour l’URSS.
A la fin de la guerre, la prospérité sociale et économique est revenue. Les 15 millions de chômeurs ont trouvé un emploi. Les entreprises sont prospères. L’Etat a des rentrées fiscales imprévues. Le plan keynésien de relance a fonctionné au-delà de tout espoir.
A partir de ce moment-là, la politique keynésienne, l’état keynésien redistributeur s’impose comme outils privilégiés des politiques publiques économiques. Ils sont utilisés par tous les pays européens, surtout si l’économie est en panne. Souffre de sous-emploi. Pendant plus de quarante ans, le keynésianisme est enseigné à l’université comme la meilleure politique économique possible. On citera notamment les livres de Galbraith.
Comment expliquer le succès remporté par la politique keynésienne ?
Parce que cet outil est inséparable de la lutte contre la pauvreté, considérée alors comme la priorité du champ politique. Comme explique très bien Pierre Bourdieu : entre 1945 et 1981, le champ politique est structuré autour de l’opposition riche/pauvre (cf son ouvrage : “Réflexions sur le champ politique”, édition Presses universitaires de Lyon, 1998). Résultat : tous les hommes politiques de premier plan font de l’augmentation des salaires, la lutte contre le chômage et la pauvreté, leur préoccupation numéro une.
Cela concerne bien sûr les communistes Maurice Thorez et Waldeck-Rochet. Mais aussi le radical Pierre Mendès-France, le centriste J-E. Jeanneney, sans oublier bien sûr l’Abbé Pierre, ex-député MRP. Et Georges Pompidou, que l’annonce de 400 000 chômeurs en 1967 empêche de dormir.
Naturellement chacun a sa réponse, chacun voit midi à sa porte. Mais sur le principe de parler d’abord de la nécessité de tirer par le haut les plus faibles, tout le monde est parfaitement d’accord.
Mais la donne change à compter des années quatre-vingts. Comme explique Pierre Bourdieu : “avec l’arrivée de Jean-Marie Le Pen dans les médias, -autorisée personnellement par mitterrand en 1985-, le clivage structurant la vie politique riche/pauvre disparait au profit d’un nouveau clivage français/étranger (cf Réflexions sur le champ politique, op cit). Puis du clivage homme/femme. Pro écologistes et anti écologistes. Pro LGBT et anti LGBT….
Le primat de la question sociale est remplacé par le primat des questions sociétales.
Dans ces nouvelles priorités, les hommes politiques abandonnent tout discours sur la pauvreté, férocement mise au rancart de l’impensé et du refoulé. L’état keynésien devient donc à son tour un instrument inutile. Bon à la casse.
2-2°)-Dans les années 80, la mise à mort du keynésianisme par les libéraux :
En effet, le tournant libéral des années quatre-vingt rebat totalement les cartes dans les têtes et dans les priorités des politiques économiques.
Le capitalisme libéral mondialisé impose le primat de la politique de rigueur à vie. Un déficit ne devant pas excéder 3% du PIB, une pure invention de coin de table imaginée par Guy Abeille, administrateur de l’INSEE, sur demande expresse de Mitterrand.
De façon cynique, la lutte contre le chômage cesse d’être la priorité des pouvoirs publics. Les augmentations de salaires aussi. Résultat : depuis les années quatre-vingt les salaires stagnent, augmentant en moyenne de moins de +1% par an contre +2,25% entre 1959 et 1979 : soit une baisse en salaires réels.
Dans ce contexte, et comme explique très bien le sociologue Frédéric Lebaron, du jour au lendemain, et pour des raisons plus idéologiques que véritablement économiques, le keynésianisme est mis au rancart par Mitterrand, trop soucieux de s’aligner sur les politiques libérales de ses grands amis : Thatcher et de Reagan.
Du jour au lendemain, le keynésianisme, qui avait pourtant largement fait les preuves dans l’histoire, notamment avec le succès du New Deal, est mis aux oubliettes. Considéré comme un objet de musée.
On nous « explique” que la politique keynésienne est “impossible”, car le multiplicateur de Keynes relancerait les importations et non la production intérieure. L’argument est spécieux : on peut tout à fait protéger la production intérieure par un protectionnisme intelligent. Ne pas avoir les deux pieds dans la mondialisation forcenée des échanges, dominée par les Etats-Unis, comme le fait imprudemment et de façon profondément anti sociale un certain Mitterrand entre 1981 et 1995. Puis les autres gouvernements entre 1995 et 2023.
2-3°)- Résurrection du keynésianisme :
Mais l’histoire du keynésianisme rebondit en Chine. La connaissance de la Chine est très complexe. Comme nous disait le regretté Alain Benajam : “pour comprendre la Chine, il faut savoir qu’elle est structurée par sept familles idéologiques différentes. Dont l’une est l’équivalent de la City londonienne, avec ses prêts toxiques : hedges, effet de levier, etc…”(sic).
Mais parmi ces sept familles, il existe aussi la famille keynésienne. Ainsi, le gouvernement chinois de Xi Jinping fait le choix d’un état keynésien, une demande intérieure avec des salaires relevés régulièrement. Et une politique de lutte contre la pauvreté, comme analyse l’économiste marxiste Vincent Gouysse. Ce qui ne l’empêche pas d’être la première économie mondiale.
Il faut savoir que Xi Jenping est le fils d’un dignitaire chinois du Parti communiste chinois (PCC). Avec la révolution culturelle, à ce titre, il est « puni » de façon très injuste. Envoyé à la campagne cultiver la terre. Mais Xi Jenping joue le jeu, devient membre de base du Parti communiste chinois (PCC). Grimpe tous les échelons et devient le dirigeant number one de la République populaire chinoise, que l’on sait. Xi Jenping transforme sa béquille en canne de golf. Mais il garde dans sa tête les résidus de la culture maoïste et populiste du PCC appris pendant sa jeunesse.
Idéologiquement ce n’est donc pas un libéral de choc, obsédé par la seule recherche du profit immédiat. Il a donc un autre espace des possibles, qui le démarque de nos dirigeants européens lobotomisés par la seule idéologie libérale.
L’exemple chinois montre donc qu’il est parfaitement possible de mener une politique keynésienne, tout en étant la première puissance économique du monde. Maintenant des échanges extérieurs avec les BRICS et l’Occident.
Mieux encore, Donald Trump s’inspire du modèle chinois keynésien. Au mois de décembre 2020, il décide d’un grand plan keynésien d’un montant de 500 milliards de dollars. Mais il ne peut le réaliser, car “battu” par Biden au terme d’élections largement truquées. Nul doute que si Donald Trump est réélu en 2024, il mènera une grande politique keynésienne, qui structurera tout son mandat.
On assiste donc à un retour du keynésianisme, notamment aux Etats-Unis, le pays chantre du libéralisme, responsable de sa disparition comme outil privilégié des politiques publiques économiques à compter des années quatre-vingt.
Voilà pourquoi le programme du Rassemblement Pouvoir au Peuple préconise la définition d’un grand plan de relance keynésien d’un montrant de 500 milliards d’euros.
Demain, nous présenterons les propositions économiques du Rassemblement Pouvoir au Peuple.