Les crimes de la Wehrmacht hantent l’Allemagne d'aujourd'hui !
Article rédigé par l'AFP le 18 mai 2017 +commentaires Brigitte Bouzonnie
1°)- Brigitte Bouzonnie : De façon feutrée, euphémisée, un article de l’AFP de 2017 évoque “les souvenirs de la Wermacht, qui hantent l’Allemagne d’aujourd’hui” (sic) (premier titre de cet article).
Que l’on me permette d’évoquer ma modeste connaissance du sujet, qui n’a rien à voir avec le brouet insipide vendue par l’AFP aux ordres.
1-1°)-Une exposition itinérante est montée en 2005 en République Fédérale Allemande. Elle s’intitule :« Guerre d’extermination. Les crimes de la Wehrmacht », ayant été tournée en 2004 en Allemagne et Autriche. Cette exposition donne des exemples très précis d’atrocités commises directement par la Wermacht contre les juifs et les peuples slaves. Cette exposition fait grand bruit, secouant très fortement la conscience des allemands, très choqués par les révélations très crues faites dans le cadre de cette exposition.
1-2°)- Ce que voyant, la chaine ARTE organise une émission intitulée clairement : “les crimes de la Wermacht” en 2007, faisant souvent référence à l’exposition itinérante. J’ai vu cette émission qui m’a beaucoup émue. Je me souviens notamment de ce témoignage d’un ex-soldat de la Wermacht, portant des lunettes avec des verres très épais. A cause de sa grande myopie, on l’avait mis à la cuisine, peler les pommes de terre. Ses camarades de la Wermacht partirent “nettoyer” le ghetto de Minsk en Ukraine. Histoire de voir ce qui se passait, il alla une fois avec eux. Ce fut horrible. Les soldats fracassaient les bébés contre la pierre des bâtiments, etc…Il y avait chaque jour l’équivalent de Oradour- sur- Glane, commis par els soldats de la Wermacht….
1-3°)- Troisième temps: un livre sort sur le sujet écrit par Wolfram Wette : “les crimes de la Wermacht”, édition Perrin, 2009, livre que je possède. La quatrième de couverture annonce de façon alléchante qu’il s’agit d’une “excellente synthèse sur les crimes commis par l’armée allemande” (sic). Mai le contenu est insipide à souhait. A peine peut-on lire, au détour d’une page que la Wermacht n’a pas été totalement la blanche colombe que l’on sait. Naturellement, les exemples concrets ont tous disparu au profit de vagues généralités.
2-4°)- Ce livre donne le ton. Désormais, chaque fois que l’on parle de la Wermacht, le mot “crimes” a disparu. On euphémise à mort toutes les atrocités commises. l’article de l’AFP ci-dessous participe plein pot de ce recentrage idéologique, pour ne pas dire plus.
2-5°)-”Heureusement” pour la vérité si on peut dire, se détache le travail de l‘historien Eric Branca, dans son ouvrage ”Le roman des damnés. Ces nazis qui sont passés au service des vainqueurs”, édition Perrin, 2021. Il montre, à travers le portrait du Général Paulus, comment la Wermacht participa à : “l’invasion de l’URSS, conçue comme une entreprise de colonisation de l’espace russe, réduction en esclavage de ses habitants et d’extermination des inutiles”(sic). E. Branca pointe clairement les crimes de la Wermacht mise au même rang de responsabilité que les nazis.
Je vous invite donc à lire cet article avec la plus grande prudence.
2°)- Article AFP :
La Wehrmacht a longtemps été épargnée par la confrontation avec le passé national, mais après la découverte de vestiges nazis dans des casernes de la Bundeswehr, l'Allemagne n'échappe pas au débat
La ministre allemande de la Défense, Ursula von der Leyen, au centre, avec l'Inspecteur général des forces armées allemandes, Volker Wieker, à droite, et l'inspecteur Heer General Joerg Vollmeer, à gauche, sur la base du 291e Jagerbataillon à Illkkirch, le 3 mai 2017. (Crédit : Frederick Florin/AFP)
En s’attaquant aux vestiges de l’armée nazie dans les casernes, le gouvernement allemand a déclenché une polémique qui illustre l’ambivalence du pays face à la Wehrmacht, longtemps épargnée par la confrontation avec le passé national.
« Je pense que la Bundeswehr doit clairement montrer, en interne comme à l’extérieur, qu’elle ne se situe pas dans la tradition de la Wehrmacht », déclarait récemment la ministre conservatrice de la Défense, Ursula von der Leyen, à l’origine de l’offensive.
Si elle sonne comme une évidence, cette ligne de conduite divise au point d’avoir été débattue mercredi après-midi à la chambre des députés, dans la foulée du scandale qui agite l’armée depuis l’arrestation de deux militaires proches de l’extrême droite, soupçonnés d’avoir planifié un attentat.
Après la découverte de reliques de la Wehrmacht dans leur caserne, Von der Leyen, une proche d’Angela Merkel, a annoncé une inspection de tous les bâtiments de la Bundeswehr, un renforcement des règles disciplinaires, une meilleure éducation civique des troupes et la réécriture de l’arrêté qui encadre les traditions au sein de la Bundeswehr et qui date de 1982.
Helmut Schmidt, en 1976 (Crédit : Bundesarchiv, B 145 Bild-F048644-0035 / Wegmann, Ludwig / CC-BY-SA 3.0)
Il est nécessaire de réviser cet arrêté car il comportait trop de « portes dérobées », a insisté Von der Leyen lors du débat, alors que selon l’agence de presse dpa, une quarantaine de reliques de la Wehrmacht ont été découvertes lors de l’inspection.
Deux mesures focalisent l’attention : un projet de « rebaptiser » la vingtaine de casernes qui évoquent encore le IIIe Reich et le décrochage d’un portrait de l’ancien chancelier Helmut Schmidt, en uniforme de la Wehrmacht, à l’internat de l’Université de la Bundeswehr de Hambourg.
En mémoire des pères
« La Wehrmacht était une organisation qui a commis des crimes de guerre, ils ont tué des centaines de milliers, des millions de civils », a martelé lors du débat la députée de gauche radicale Ulla Jelpke.
« En d’autres temps, on aurait parlé de chasse aux sorcières », a fustigé l’ancien ministre social-démocrate de la Défense, Rudolf Scharping, déplorant le retrait du portrait de Helmut Schmidt décidé par l’université elle-même.
Adolf Hitler dans les années 1930 dans « Le règne de terreur d’Hitler » (Crédit : Archives/capture d’écran YouTube)
Rainer Arnold, spécialiste des questions de défense du même parti, a assuré que cette photo était « le meilleur moyen d’examiner l’histoire des militaires sous Hitler », d’autant que Helmut Schmidt a raconté à maintes reprises sa « guerre de merde ».
Mais le débat a vite débordé la question des « traditions » dont doit se doter la Bundeswehr, créée en 1955, pour concerner la place des 18 millions de soldats passés par la Wehrmacht dans la mémoire intime de l’Allemagne.
« Le respect dû à nos pères et nos grands-pères commande » d’éviter une « condamnation en bloc » de la Wehrmacht, a déclaré le conservateur bavarois (CSU) Hans-Peter Uhl, comme plusieurs autres députés de ce parti allié à celui de la chancelière, dénonçant un procès « futile ».
« Je ne laisserai pas la photo de mon père en soldat de la Wehrmacht reposer dans une boîte à chaussures […]. Je ne vois pas pourquoi j’aurais honte de lui », a renchéri Theo Sommer, ancien proche de Helmut Schmidt, dans l’hebdomadaire Die Zeit.
Plusieurs historiens réclamaient de longue date le réexamen des noms des bâtiments militaires, engagé en 1995 avec des débats féroces autour de la caserne bavaroise Eduard-Dietl, du nom d’un général engagé dans l’invasion de la Pologne, Norvège et Finlande.
Exposition controversée
Erwin Rommel et son équipe près d’El Agheila, le 12 janvier 1942. (Crédit : By Bundesarchiv, Bild 183-1982-0927-503/Zwilling, Ernst A. /CC BY-SA 3.0/WikiCommons)
Cette mesure ne fait pourtant pas l’unanimité : certaines communes s’y opposent et Theo Sommer, dont le père a participé à la campagne nord-africaine d’Erwin Rommel, refuse que les deux dernières « casernes Rommel » soient débaptisées : « la stratégie et la tactique de [Rommel] doivent continuer à être enseignées », estime-t-il.
Le débat ravive aussi les questions sur le rôle de la Wehrmacht dans les crimes nazis, refoulés dans l’immédiat après-guerre quand l’opprobre se concentrait sur la Gestapo et les SS.
Dans les années 1990, l’historien Omer Bartov avait démontré la fanatisation des troupes et les atrocités commises par la Wehrmacht sur le front de l’Est.
Mais pour l’opinion allemande, le choc était venu d’une exposition montée en 1995, « Guerre d’extermination. Les crimes de la Wehrmacht », qui a tourné jusqu’en 2004 en Allemagne et Autriche dans un contexte houleux. Un attentat à l’explosif avait même visé l’événement à Sarrebrück en 1999.