LE PHILOSOPHE RUSSE YOURI KOVALEV PROPOSE UNE EUROPE CONTINENTALE UNIE DE BARCELONE A VLADIVOSTOK, Yes !
Article rédigé le 15 septembre 2022 par Youri Kovalev
Dans son dernier discours, Poutine aussi propose une Europe allant de Brest à Vladisvostok !
« Untying the Ukrainian Knot : The Continental Union Project »[1] – ce texte de Youri Alexandrovitch Kovalev a été publié à la mi-septembre sur la plate-forme du Russian International Affairs Council. En tant que philosophe l’auteur s’intéresse au contraste civilisationnel entre la Russie et l’Occident au sein de l’Académie des sciences de Russie.[2] Si l’on tient compte de la mission fondamentale du Russian International Affairs Council[3] et du fait que ce texte a été publié en anglais et s’adresse donc à un lectorat international, il mérite donc un second regard.
L’ascension et la chute du « projet rouge »
Kovalev commence par préciser que le « nœud ukrainien » peut être résolu soit par le recours à la force, soit sans. Il précise également que dans son texte, il ne discutera que de la voie sans recours à la violence. L’auteur entre ensuite rapidement dans le vif du sujet :
« La Russie doit proposer un nouvel agenda : un projet visant à établir une union d’Etats s’étendant de Lisbonne à Vladivostok. Pour paraphraser Karl Haushofer, j’ai appelé cela le projet d’Union continentale. De cette manière, les personnes qui y vivent, tout en appartenant à leurs propres groupes ethniques (différents), partageront en même temps une identité supra-ethnique commune. Ce sera l’un des principaux facteurs de la fin progressive de tous les conflits ».
Une fois ce pion planté, Kovalev déroule sa pensée, ne se privant pas de faire de nombreuses références – tout à fait intéressantes – à l’histoire et à la philosophie politique russes. Sa thèse d’introduction consiste à considérer les Lumières et le communisme comme les premières idéologies, non issues d’une religion, d’une société orientée vers le bien commun. Cette orientation vers le bien commun, le « service au prochain », est – selon lui – la condition de base pour le fonctionnement pacifique de sociétés prospères.
« Permettez-moi de souligner qu’il n’est possible de mettre fin à la haine, à l’injustice sociale, etc. dans un pays que si la majorité de sa population acquiert une tendance psychologique partagée à “servir les autres”. En d’autres termes, le simple fait d’avoir des “valeurs traditionnelles” est suffisant ici ».
Selon Kovalev, l’idée des Lumières, en exaltant l’individu, les droits de l’homme et la démocratie, a poussé les sociétés dans les mains de la consommation et de l’intérêt personnel. De ce fait, la société occidentale serait progressivement devenue « post-chrétienne » et aurait quitté le « corridor » des valeurs chrétiennes qui (avec toutes leurs réserves) ont constitué le troisième niveau de moralité (l’orientation vers le bien commun, ndlr) chez les individus.
Le philosophe s’intéresse ensuite de manière beaucoup plus approfondie (et avec de nombreuses références historiques) au communisme et à la question de savoir pourquoi cette idée a pu s’implanter précisément en Russie. Et il se penche avec au moins autant de passion sur les raisons de l’échec du « projet rouge », qui a ouvert la voie à l’établissement du socialisme soviétique.
Kovalev en arrive à la conclusion :
« Pour résumer ce qui a été dit, dans les termes du célèbre dissident yougoslave Milovan Djilas : dans les révolutions bourgeoises, souligne-t-il, les forces sociales qui devaient former une nouvelle société existaient déjà AVANT que la révolution n’éclate. La révolution en Russie a été la première dans l’histoire à Avoir créé une nouvelle société et de nouvelles forces sociales. C’est pourquoi, en Occident, les révolutions bourgeoises, après toutes les “déviations” et les “retours”, ont inévitablement conduit à la démocratie, alors qu’en Russie, elles ont inévitablement conduit au despotisme ».