L'AUTODESTRUCTION DU PARTI SOCIALISTE...!
Le Monde Diplomatique n° 748 de juillet 2016, très bel article sur la mort du parti socialiste, rédigé par Remi Lefebvre, professeur de sciences politiques, toujours + commentaires Brigitte Bouzonnie
Remi Lebebvre, professeur de sciences politiques dont nous apprécions les articles, membre du Parti Socialiste, consacre un long article à la dérive du PS : vous le trouverez dans le dernier numéro du Monde Diplomatique du mois de juillet 2016.
1)-MILITANTS EN FUITE, ELUS EN DEROUTE (Remi Lelebvre) :
Son constat est cinglant : "rarement un parti aura été aussi rapidement abimé par son passage aux affaires. Désormais, l'aversion suscitée dépasse de très loin les franges de la gauche radicale, et la déception que provoque immanquablement l'exercice "réformiste" du pouvoir"(sic). Et de pointer "la constance du gouvernement : la politique menée, aussi suicidaire qu'elle puisse apparaitre, n'est pas négociable. Elle découle pour une large part des contraintes européennes" (sic). "Des lors qu'aucune inflexion n'est envisageable, il est condamné à fabriquer un improbable électorat de substitution au centre gauche".
"En 2012, il accède au pouvoir national, dirige la quasi totalité des régions, 60% des départements, les deux tiers des villes et même, pour la première fois de son histoire, le Sénat (1). Quatre ans plus tard, la machine électorale est dévastée. En 2014, il a perdu 162 villes de plus de 9000 habitants. Et ne dirige plus que 5 régions et 26 départements" (sic). "En 2014, le renouvellement des cartes ne dépasse pas 60 000 adhérents, soit largement 50 000 de moins qu'en 2012.
Le PS n'est plus écouté. Au congrès de Poitiers de juin 2015, il préconise une loi plus forte que les accords locaux. Soit l'exact inverse de l'article 2 de la loi Khomri privilégiant les accords locaux sur un accord national. La Direction du PS a même renoncé à produire un programme en vue de l'élection présidentielle.
Pour Remi Lefebvre, "la destruction du parti apparait comme une stratégie délibérée de M Valls : qui cherche à imiter Tony Blair. La stratégie de M Hollande apparait plus obscure et incertaine. Il semble miser sur la progression du Front National et la désunion de la Droite. Distancié par la Droite et l'extrême Droite, rattrapé, voire dépassé par Mélenchon, Hollande ne peut retrouver de légitimité qu'en passant par la case primaires. Primaires limitées, car, faute de moyens militants, le PS ne pourra pas ouvrir autant de bureaux qu'en 2012" (sic).
Et de conclure : "l'action du gouvernement a déporté son centre de gravité du pensable et du dicible vers la Droite, comme en témoigne la loi Travail". Le PS doit tenir compte d'un Mélenchon, cherchant à marginaliser le PS. Et passer devant le candidat PS au premier tour, hypothèse désormais plus crédible qu'en 2012 " (sic, fin du topo).
2)-LES RAISONS DE LA DETESTATION DU PS (petite analyse personnelle) :
Selon nous, La détestation du PS dans le pays (cf permanences taguées, score électoral au plus bas, etc résulte d'une certaine "logique". LE PS PAIE CASH AUJOURD'HUI LES RENONCEMENTS, LES PRATIQUES DES ANNEES 70 :
2.1)-Sur le champ des idées, le PS abandonne dans les années 70 les Classes populaires à leurs problèmes (cf célèbre analyse du think thank “Terra nova” mettant les ouvriers au rencart). Il choisit le tournant de la rigueur en 1983, abandonnant son célèbre Programme Commun. Notamment la fin de l'indexation des salaires sur les prix. Optant pour la fermeture des grands fiefs industriels du Nord et de l'Est de la France : précipitant dans le chômage de masse un million de salariés entre 2000 et 2008, puisque le chômage passe de un à deux millions de chômeurs.
Comme le montre très bien l’économiste Jacques Sapir, qui a fait travailler ses étudiants sur l’idéologie européenne, dans le cadre d’un séminaire ad hoc, le PS, à la place de ses slogans de lutte contre le chômage, développe nouveau un rideau de fumée en faveur de l’Union Européenne. Comme bonimente Mitterrand, "L'Europe est le meilleur moyen de lutter contre le chômage de masse". Le discours sur "L'Europe heureuse"(sic) est le supplément d'âme inventé par le PS, pour faire oublier aux Classes populaires, qu'il avait abandonné la question sociale, jugée "archaïque”, “dépassée" (sic). Cette translation de slogans est capitale, pour comprendre la mue du parti socialiste !
Aujourd'hui, avec une Union Européenne comprenant 125 millions de pauvres, les électeurs les moins politises découvrent l'incroyable mensonge attaché au discours européiste du PS... !
2.2)-L'hégémonie du PS sur les autres partis de gauche (PCF, PSU, LCR), apparue au début des années 70,. avec le congrès d'Epinay, et son célèbre discours de rupture, s'achève sans gloire aujourd'hui. Le PS des années 70, arrogant, hégémonique, refusant toute alliance ou s'alliant du bout des dents avec un autre parti de gauche : PCF, PSU, LCR...: au motif qu'il était LE SEUL PARTI DE GAUCHE, les autres n'étant que des microbes et je suis polie..., est terminé. Aujourd'hui, par tous les moyens, il appelle à "l'union de la gauche"(sic), histoire de cacher ses désastres électoraux. Les dernières élections partielles, le candidat PS arrive DERRIERE celui du FDG ou du candidat EELV.
2.3)-Pendant quatre décennies, les courants du PS (CERES de Chevenement, Mitterandistes, rocardiens, etc.) ont été soudés entre eux par UNE DYNAMIQUE DE SUCCES. Le PS était une machine à gagner, qui faisait être et militer ensemble des femmes et des hommes, qui n'avaient absolument rien en commun sur le plan idéologique. C'était aussi l'époque ou des Hollande, Ségolène...adhéraient au PS, afin d"obtenir les plus belles places de pouvoir : sans aucune conviction sociale de "gauche" (sic).
Aujourd'hui, la dynamique d'échec fonctionne en sens inverse. Le PS est devenu une machine à perdre. Les conflits entre les frondeurs et le gouvernement sont une illustration de ce nouvel état de fait...!
Cette détestation n'est plus le fait des seuls militants de l'extrême gauche. Mais l'état d'esprit de tout le monde, y compris les gens les moins politisés, les moins au courant des agissements du PS dans leur appareil, et dans leurs relations avec les autres partis de gauche.
Comme écrit très justement Pierre Bourdieu : un parti politique n'est pas un microcosme, aux seules mains d'une oligarchie. Les gens qui n'en font pas partie en font partie. Ce sont les électeurs lambda qui, avec leur vote, ont le pouvoir de disqualifier, excommunier les grands prêtres politiques du moment. Ce sont eux qui ont le dernier mot (cf Propos sur le champ politique, édition PUL, 1998).. Et c'est ce qui se passe en ce moment pour le Parti Socialiste...!
(1) -Rémi Lefèbre oublie de mentionner que Jospin, Schroeder et Blair sont au Pouvoir en France, Allemagne, Grande Bretagne en même temps : 1997-2000. Au lieu d’utiliser ce temps commun à faire des réformes sociales importantes, tirer les plus faibles par le haut, sortir du système capitaliste pourri, ils ne font RIEN !
merci