Il ne suffit pas de brandir le slogan "Grève générale" pour l'obtenir... !
Article rédigé par Brigitte Bouzonnie
REPONSE A FREDERIC LORDON ET A SON MOT D'ORDRE DE "GREVE GENERALE" :
Mes amis apprécient beaucoup Frédéric Lordon : et son mot d'ordre de "grève générale". Soit. Certes le rêve est joli, et ne rentre pas dans les clous du jeu politique "classique". Mais sa réalisation tellement incertaine. Pour réussir une grève générale, il faut réfléchir deux secondes : la question ne se pose pas dans les mêmes termes, selon que vous êtes un Directeur du CNRS comme Lordon, un fonctionnaire de collectivités locales ayant sa hiérarchie sur la couenne. Ou un précaire, pour qui chaque euro perdu est un drame personnel irrémédiable. N'oublions pas que la France compte 80% d'habitants, qui ont du mal à joindre les deux bouts.
De plus, il ne suffit pas de crier "grève générale", "grève générale", pour que aussitôt, comme par magie, les gens, transcendés des pieds à la tête par cette Vérité nouvelle, arrêtent aussitôt leur travail, comme on appuie sur un bouton.
Cela me rappelle un vieux souvenir : sur le campus de Bordeaux où je faisais mes études de Droit et de sciences politiques, un responsable local de la Ligue Communiste Révolutionnaire avait beuglé toute la soirée et la nuit "grève générale, "grève générale", avant d'aller vomir de dépit au petit matin, n'ayant pu entrainé un seul pékin dans la manoeuvre...!
Une chose est de crier "grève générale", une autre est de la réussir. Le fossé entre les deux est inexpugnable. F Lordon est mouvementiste, proche dans sa façon de faire de la politique du NPA, et de l'ex-Ligue Communiste Révolutionnaire. Il s'imagine à tort que le mouvement #NuitDebout va spontanément s'organiser, élaborer un programme, avoir une stratégie d'action : autant d'objectifs dont nous doutons beaucoup qu'il y parvienne...!
Et puis, nous avons le recul historique nécessaire pour juger des places remplies de femmes et d'hommes, désireux de faire la Révolution : par exemple, la place Tahir égyptienne en 2011. Leur sincérité n'est pas en cause. Mais leur mot d'ordre uniquement négatif, style "Moubarak dégage !" soudait les révolutionnaires, mais dans la faiblesse NEGATIVE", pour reprendre un mot d'Alain BADIOU. Or la Politique se fait au régime de ce qu'elle affirme et propose.
Or, Frédéric Lordon ne propose pas de projets, au nom du culte de l'action immédiate. Inversement, sa proposition de grève générale est fondée sur l'idée erronée selon laquelle le SENTIMENT INDIVIDUEL, la liberté de chaque participant à NuitDebout serait la racine de l'engagement politique. Telle n'est pas notre analyse : l'engagement politique n'est pas une somme d'engagements individuels, mais une DEMARCHE COLLECTIVE. IL FAUT INVENTER UN NOUS EN POLITIQUE A TRAVERS UN PROJET de ce que sera demain. Une politique, c'est une conviction active organisé dans un PROJET POLITIQUE : à l'image du programme en 35 points du Rassemblement Pouvoir au Peuple.
A ce stade, à nous de répondre et de convaincre les gamins qui taguent sur les murs : "nos rêves ne rentrent pas dans vos urnes", en leur démontant que notre beau projet politique, participant aux urnes 2017, rêve haut et fort une vie décente pour chacun, comme il n'y en a pas eu souvent dans la vie politique de ces 40 dernières années...!