Confession d'un responsable de cabinet conseil !
Texte trouvé sur le mur Facebook de Viktor Dedaj, journaliste alternatif
J'ai longtemps été consultant auprès de sociétés multinationales. (bis) Je côtoyais quotidiennement des gens dont on parlait parfois dans la presse. On se tutoyait (pour les francophones). J'ai eu ma part de "nuits folles" au frais de la princesse. Je me suis retrouvé, après un voyage en Rolls-Royce, dans l'arrière salle d'un club de nuit genevois - à 200 francs suisses la bouteille de champagne, à l'époque - avec un drag-queen brésilien sur les genoux (une longue histoire). On m'a offert "blonde, brune ou rouquine ?". On prenait l'avion comme on prend un taxi. Je les ai vus imperturbables devant l'explosion d'une usine chimique en Inde et ensuite porter un toast devant le ridicule de l'amende infligée par les tribunaux indiens. Je les ai entendus chuchoter "un million dollars pour le juge, c'est donné".
Et, accessoirement, j'étais aussi membre du parti communiste.
La question qui m'était souvent posée par ceux qui connaissaient mon métier était "est-ce qu'ils sont aussi cyniques et cruels qu'ils en ont l'air, là-haut ?". Ma réponse à l'époque était "Finalement, probablement pas plus que partout ailleurs. Mais certainement pas moins. Et c'est ça le problème." Opportunistes, certainement, car il fallait l'être pour arriver en haut de l'échelle, car la concurrence est sans pitié et l'oxygène rare. Psychopathes aussi, car l'empathie n'est pas la qualité première pour "réussir" dans ce genre de milieu. Autant de traits qu'on trouve couramment à tous les niveaux. Sauf que... ces gens avaient (ont) un pouvoir phénoménal, une influence sur la vie des gens. Parfois de vie ou de mort.
Quand l'écart entre un pouvoir (très élevé) et le niveau de conscience sociale (très bas) est aussi vaste, il ne peut rien en sortir de positif à terme.
Le plus drôle ? Plus on montait dans la hiérarchie, et plus on croisait des "Marxiens" (à ne pas confondre avec des Marxistes). Des Capitalistes purs et durs, maîtrisant à la perfection le langage, et qui en même temps te disaient froidement - comme pour te convaincre - que Marx avait évidemment raison. Ils le constataient tous les jours. Du Capitalisme, ils en étaient les acteurs principaux et les piliers. La loi de l'offre et la demande les faisaient ricaner. La Bourse n'était qu'un gigantesque "délit d'initié" organisé ("qui investiraient des milliards sans prendre quelques précautions ?"). Je me demande ce qu'ils pensent du "ruissèlement des richesses vers le bas" (le terme n'était pas encore en vogue à l'époque)
Et c'était évidemment quelque chose qu'ils n'auraient jamais admis en public.
Paradoxe ? Pas vraiment. On peut parfaitement connaitre le droit fiscal et *en même temps* pratiquer l'évasion fiscale. A bien y réfléchir, c'est même une condition préalable indispensable. Bien comprendre les rouages pour mieux les graisser à son avantage est un exercice réservé à l'élite. Et pendant que vous lirez du Alain Minc (par exemple) promu par leurs sociétés de communication et vendu au relais Hachette de la gare, eux réviseront "Le Capital" en catimini en planifiant leur prochaine crapulerie.
J'ai longtemps été consultant auprès de sociétés multinationales. On fait forcément des rencontres. Comme ces consultants d'Arthur Anderson, rencontrés au bar d'un hôtel de luxe (on vivait la grande vie) et qui, après quelques verres, ont raconté comment on leur avait donné la conclusion : liquider l'acier & le charbon français.
Leur mission avait consisté à trouver une justification.