Boulon précaire cherche clé à molette ultra-libérale... !
Article rédigé en 2015 par Brigitte Bouzonnie, où on attaque déjà une loi Macron
"L'homme est a tordre. A fragmenter. A rompre. A morceler. A vendre bien sur. Depuis longtemps. Lui seul l'ignore. Cela aide de ne pas savoir. S'aveugler fait vivre. Durer. Homme chose. Homme-objet. Matière première. Matière secondaire. Energie consommable. Renouvelable. Pâte à modeler broyé entre les mâchoires du système"(sic) : c'est le début d'un texte littéraire rédigé par Paul Claudel, l'auteur des "âmes grises" pour le journal "Le 1", n 45, pour nous parler de l'homme précaire.
1)- L'énorme turn over des CDD sur le marché du travail :
Cette description peu complaisante de la précarité masque pourtant le principal : le précaire est pris pour lui même, et en face il n'y a qu'un vague "système", qu'on lui oppose : terme aussi flou et opaque que possible. L'auteur de ces lignes se garde bien de préciser CELUI qui organise la précarité, la rend possible,-l'employeur. De la même façon, il est muet sur l'autre, celui qui l'OFFICIALISE dans des lois et des décrets publiés au Journal Officiel de la République Française : le gouvernement. Autrement dit, Claudel "oublie" de se référer explicitement, tout à la fois, à l'employeur qui, aujourd’hui, ne recrute plus qu'en CDD. Et à l'Etat, qui légitime et pérennise ce mode de domination fonde sur l'institution d'un état généralisé et permanent d'insécurité",- comme l'explique Pierre BOURDIEU dans son ouvrage "Contre-feux", édition Raison d'agir, 1998. Celui qui assure la pérennité du système, par des lois successives depuis 30 ans : faisant de la précarité un phénomène de grande ampleur :
- Pierre CAHUC, économiste, directeur du CREST, qui vient d'écrire "Les ennemis de l'emploi" parle d'un ENORME TURN OVER : "le flux d'entrée, sur le marché du travail, hors intérim est de 20 millions par an. Sur ces 20 millions, 90% sont des CDD et 80% d'entre eux signent des contrats d'une durée inferieure à un mois. C'est un phénomène de grande ampleur qui a doublé en une décennie".
- Mais il faut savoir que la rotation très rapide des missions se fait sur 3,2 millions de personnes en CDD, soit 13 a 14% de la population active hors intérim. Il n'existe pas de tendance forte a la baisse du CDI : cf interview de Cahuc dans le journal du 1, n 45.
Les sociétés intérimaires, avec l'exemple extrême des intermittents du spectacle, comptent sur l' indemnisation chômage pour payer de facto une partie de la rémunération du salarié. Soit une façon pour les grosses entreprises du spectacle d'EXTERNALISER le cout de la main d'oeuvre sur l'assurance chômage. Mais l'intérim ne profite pas qu'aux industries du spectacle, l'industrie automobile en profite également beaucoup...!
2)- Le projet d'unifier CDI et CDD :
Dans un rapport de 2004, Cahuc et Kramarz préconisent "d' unifier le contrat de travail, sujet de nouveau d'actualité, car proposé par le MEDEF. Dans ce scénario, les entreprises pourraient rompre le contrat de travail en CDI, à leur propre initiative. En contrepartie, elles paieraient une contribution pour financer l'accompagnement des personnes licenciées". Et c'est là où on retrouve l'ANI et la loi Macron, dont le projet est justement de limiter très sérieusement les indemnités chômage du salarié licencié.
Donc Loi Macron + projet Cahuc = des licenciements plus faciles pour les salariés en CDI, + des indemnités fortement revues à la baisse...Un nouveau système, où le salarié en CDI perdrait sur les deux tableaux : la sécurité de son emploi et les indemnités licenciements auxquelles il a droit.
Ce projet est profondément inacceptable. Dans la manif du 8 avril contre la loi Macron, il importera de se mobiliser contre le projet de loi Travail, en particulier contre ce contrat de travail unique, véritable enterrement de la sécurité de l'emploi du salarie en CDI...! Soit la fabrique d'un seul salarié, le salarie jetable, ayant perdu à jamais sa dignité d'être...