C’est le titre d’un documentaire de Tim Dunn diffusé mardi soir sur Arte.
Bombarder Auschwitz aurait-il permis de s’élever contre le génocide en cours ? Ne pas l’avoir décidé fait-il des Alliés des complices objectifs des nazis ? Ce brillant documentaire nous plonge dans l’histoire d’une inaction qui pose toujours débat.
En effet, c’est l’une des plus délicates questions du XXe siècle : fallait-il bombarder le camp d’extermination d’Auschwitz-Birkenau ?
Avril 1944, Rudolf Vrba et Alfred Wetzler, deux Juifs slovaques, évadés d’Auschwitz et réfugiés en Slovaquie, décrivent la machine infernale mise en place par les nazis à un représentant du Conseil juif. Ce dernier fait consigner par écrit tous ces témoignages : le document sera appelé « Protocole d’Auschwitz ».
Une fois le document aux mains des Alliés, il s’ensuivra une suite de lâchetés et d’hésitations. Durant quelques mois, jusqu’au 26 novembre 1944, date des derniers crimes dans les chambres à gaz de Birkenau, la question de bombarder ou non le camp se pose, notamment aux autorités britanniques et américaines. Rapports de force, lâchetés, hésitations, conscience des imprécisions techniques des bombardements, ce qui se joue en coulisses, dans les cabinets ministériels, les états-majors et les centres d’aide pour réfugiés, entre Londres, Washington et Jérusalem, est minutieusement analysé. Et permet de mieux comprendre pourquoi, entre avril et novembre 1944, alors que la guerre n’est pas encore gagnée, les partisans du bombardement n’ont pas eu gain de cause. Ni Churchill ni Roosevelt, n’ont jugé utile de forcer leurs subordonnés militaires à bombarder le camp. Quant aux Soviétiques, beaucoup plus près de la cible, ils demeureront aux abonnés absents.
La période la plus meurtrière dans le camp se situe entre mai et juillet 1944. Le rythme des exécutions, surtout de Juifs hongrois, atteint un pic avec plus de 5 000 gazés chaque jour.
L’argument retenu par les Alliés : bombarder une usine utile à l’effort de guerre du Reich oui, mais pas un camp de prisonniers, aussi atroce soit-il.
Du coup, le 13 septembre 1944, l’aviation américaine cible l’usine IG Farben, à 7 km des chambres à gaz, et bombarde par erreur Auschwitz.
Trop peu, trop tard, le camp d’extermination continue de fonctionner à plein régime, jusqu’au jour précité où les nazis entreprennent de détruire et d’effacer les traces de leurs crimes. Mais cette destruction ne fut que partielle. En outre, une partie des détenus survivants est alors évacuée dans des conditions épouvantables à destination des usines d’armement du Reich encore en fonctionnement.
Le 27 janvier 1945, les troupes soviétiques découvrent l’horreur du camp d’extermination d’Auschwitz-Birkenau.
1 300 000 personnes, dont 90% de Juifs, ont été déportées en ces lieux. 1 100 000 y ont été assassinées !
Ci-dessous : Vue aérienne du camp d'extermination d'Auschwitz-Birkenau à son extension maximale (cliché de la RAF du 23 août 1944).